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UNE AUTRE FORME DE TRAUMATISME*




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- Peut-on être traumatisé par ce que l'on n'a pas vécu ? Je pense par exemple aux attentats (ou des faits divers, par exemple) qui peuvent avoir eu un impact sur nous, notre moral, notre façon d'agir, alors que nous avons vécu l’événement « par procuration » (et dans ce cas, peut-on parler de traumatisme ?)


Oui, bien sûr, chacun de nous peut être traumatisé par ce que nous voyons à la télévision, sur Internet et, plus encore, dans la rue, les transports ou ailleurs. Les événements graves sont aussi facteurs de traumatisme pour ceux qui en sont témoins. Ce phénomène découle, en partie de nos capacités d’identification, de notre empathie et de notre sensibilité consciente : nous percevons en nous-même ce qui est arrivé à d’autres.


- Les médias et la course à l’information ont-ils accentué ce phénomène ? 

Effectivement, les médias ont tendance à délivrer des informations brutes, non élaborées, non filtrées, en direct, comme lors des attentats terroristes en France. Le massacre de Nice le soir du 14 juillet 2016 est un exemple extrême de ce déversement d’images et de paroles qui faisait vivre en direct les ravages du carnage la nuit même de la tragédie, dans les décombres et parmi les cadavres. Ces images crues en boucle finissent par avoir un effet traumatique démultiplié. C’est très grave et il est important que les journalistes en prennent conscience autant que les téléspectateurs.


- Peut-on parler de « traumatisme collectif » ? Si oui, de quoi s’agit-il et dans quel(s) cadre(s) ?

Oui, exactement. Les catastrophes comme les guerres, les génocides, les déportations, les exodes massifs, ainsi que les attentats terroristes engendrent des traumatismes multiples à la fois individuels et collectifs.


- On parle aussi beaucoup de « stress post-traumatique ». Est-il possible d’en être victime lorsqu’on n’a pas vécu directement l’événement ?

Ce terme est issu de la psychiatrie américaine. Il est né après la guerre du Vietnam. De ce fait, le mot « stress » minimise l’importance des dommages et des ravages des guerres, tout en mettant en évidence les conséquences traumatiques de la guerre. En fait, en français, il vaudrait mieux parler de « détresse post-traumatique », ce serait beaucoup plus exact et respectueux de ceux qui souffrent des suites d’un événement particulièrement grave ou d’une catastrophe.
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- Que conseilleriez-vous aux personnes qui se sentent « traumatisées » par des événements médiatiques qu’elles n’ont pourtant pas vécus (d’en parler à un professionnel, de désactiver leurs alertes infos sur leur téléphone, par exemple…) ?

A mon sens, trois étapes sont nécessaires :

1) Prendre de la distance avec les informations en direct, à la télévision ou sur Internet.

2) Se protéger plus particulièrement lorsque l’on se sent fatigué ou déjà fragilisé par d’autres événements difficiles (divorce, déménagement, licenciement, deuil, maladie grave) et protéger ses enfants.

3) Consulter un professionnel du soin psychique, même ponctuellement, chaque fois qu’une information d’une grande violence a dépassé notre capacité du moment à y faire face et que nous nous sentons débordé, profondément déstabilisé ou hanté par des images barbares.

 

Par Saverio Thomasella, Docteur en psychologie clinique, auteur de nombreux ouvrages;

 



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